Enseignement


Jan 26, 2013

EPIDEMIOLOGIE DES LYMPHOMES MALINS NON HODGKINIENS


Pr N BOUDJERRA.


EDITORIAL

De nombreux progrès ont été effectués ces dernières années d’une part au niveau du diagnostic anatomo pathologique et ce grâce aux techniques d’immunohistochimie et d’autre part par des études coopératives randomisées qui ont permis d’établir des facteurs pronostics admis par tous, qui deviendront associés à l’âge et aux stades cliniques, les éléments essentiels pour un choix thérapeutique.

La connaissance scientifique progresse à des allures considérables, la multiplication des revues publiant les résultats des travaux d’équipes mondialement connues est un fait avéré, il devient par conséquent de plus en plus difficile de disposer de l’ensemble des informations dans des délais raisonnables.

L’opportunité nous est donc donné par le biais de cette revue d’exposer l’essentiel de nos résultats comparés aux résultats publiés par les équipes internationales.

Ce travail, nous le souhaitons, sera l’embryon d’une étude coopérative nationale entre hématologistes et anatomopathologistes dont l’objectif principal sera d’assurer à tous les patients de l’ensemble du territoire national les mêmes chances pour un diagnostic précis et un traitement adapté au type de lymphome afin de lui garantir une guérison ou tout au moins chez les sujets plus âgés une survie sans progression de bonne qualité et la plus longue possible.

Dans le but de concrétiser cet objectif un séminaire de consensus sur le diagnostic et le traitement des LMNH ganglionnaires de l’adulte, sera organisé les 2 et 3 octobre 2004 dans le sud algérien, ce séminaire aura comme objectifs spécifiques :

- d’uniformiser l’approche diagnostique histopathologique selon la nouvelle classification OMS.
- d’établir un consensus national sur la prise en charge thérapeutique des malades.
- de mettre en place un réseau pluridisciplinaire régional et national qui regroupera cliniciens, pathologistes, biologistes, radiologistes et chirurgiens en charge de cette pathlogie.

La motivation de l’ensemble des pathologistes et cliniciens convaincus de l’intérêt d’un travail d’équipe est nécessaire pour une bonne réussite où le malade en sortirait gagnant.

EPIDEMIOLOGIE DES LYMPHOMES MALINS NON HODGKINIENS
N. BOUDJERRA,

 

Les Lymphomes Malins Non Hodgkiniens (LMNH) sont des.hémopathies malignes, développés à partir de cellules lymphocytaires B ou T rarement NK entraînant une hypertrophie des organes lymphoides, notamment les ganglions mais aussi les organes non lymphoides.

Ils se traduisent par une diversité clinique morphologique et biologique reflétant la complexité des classifications histopathologiques modernes.

L’évolutivité clinique est variable, parfois modérée (lymphomes indolents), dans d’autres cas élevée (lymphomes agressifs)

L’intérêt particulier porté aux LMNH est du à l’augmentation de leur incidence, à une meilleur connaissance de leur développement et aux progrès thérapeutiques permettant une guérison dans un certain nombre de cas.

Incidence des LMNH

On assiste ces dernières années à une augmentation constante des LMNH , La fréquence relative est, selon les registres de cancer mis en place dans les pays développés, de 12 à 15 cas pour 100.000 habitants avec une augmentation de 5 à 10 % / an.

Le lymphome est le 5 ème cancer par ordre de fréquence chez les hommes aux Etats-Unis et Le 7 ème en France.

L’incidence de chaque type de lymphome peut varier mais de façon minime d’un pays à l’autre.

Les variations les plus fréquemment rencontrées , sont celles des lymphomes T et des lymphomes folliculaires retrouvés de façon fréquente au Japon et aux Caraibes.

L’étiologie des lymphomes

L’étiologie n’est pas connue, mais certains facteurs sont incriminés expliquant l’augmentation constante des lymphomes, on citera :
- La diminution de la réponse immunitaire qui serait l’une des causes de l’augmentation de la fréquence des LMNH chez les personnes âgés .
- l’association fréquente à des infection virales comme le virus d’Epstein Barr, virus de l’hépatite C, virus HTLV1, VIH chez le sujet jeune.
- environnementaux éventuellement toxiques tels que : herbicides, produits chimiques, teinture pour cheveux, essence du bois.

Age et sexe

Les lymphomes malins non hodgkiniens se voient à tout âge, l’âge moyen selon la littérature se situe entre 50 et 60 ans avec une médiane de 60 ans.

Le pic de fréquence est compris entre 65 et 85 ans.
L’homme est plus fréquemment atteint que la femme, avec un sex ratio M/F de 1.5.

CASUISTIQUE NATIONALE

Patients et méthodes

Une étude descriptive et rétrospective a été faite sur 10 ans, 1993 – 2002, au niveau de 13 services d’hématologie représentant l’ensemble des centres de traitement des LMNH.

La collecte des données s’est faite sur dossier médical La population étudiée est représentée par les malades atteints de LMNH ganglionnaires, âgés de 16 ans et plus.

Les patients âgés de moins de 16 ans et ceux ne présentant pas d’atteinte ganglionnaire ont été exclus de l’étude.

Les 13 services d’hématologie traitant les LMNH sont :
CHU Oran, EHS Pierre et Marie Curie, CHU Blida, CHU sétif, CHU Annaba CHU Constantine, CHU Béni-Messous, CHU Sétif, Hôpital Central de l’Armée ( HCA ), CHU Tizi-ouzou, Hôpital de Béchar, CHU Sidi Belabbés, Hôpital de Batna.

1723 dossiers ont été étudiés, le nombre de malades par centre est illustré par la figure suivante :

Répartition des LMNH ganglionnaires de l’adulte par centres de traitement 1993 - 2002

Résultats

Age et sexe :

L’étude de l’âge a été faite sur 1675 dossiers, l’âge n’était pas mentionné sur 48 fiches.
L’âge moyen des patients au diagnostic est de 49 ans. Extrêmes :16 - 98 ans.

On notera 2 pics de fréquence, l’un au dessous de 35 ans, l’autre de 60 à 69 ans Le nombre de patients élevé dans la tranche d’âge de moins de 35 ans et faible dans la tranche de plus de 70 ans, comparés aux études internationales, est due au nombre élevé de sujets jeunes dans notre population.

16 à 35 ans 416
35 à 49 ans 340
50 à 59 ans 274
60 à 69 ans 383
> à 70 ans 262
total 1675

Répartition des LMNH ganglionnaires selon les tranches d’âge

L’étude du sexe a été faite sur les 1723 dossiers.
Le rapport hommes / femmes est sensiblement identique à ce qui a été rapporté par les études publiées, le nombre de patients de sexe masculin est de 1011, celui des femmes est de 712, avec un sex ratio (M / F) de 1.42.

Répartition des LMNH ganglionnaires de l’adulte sur le territoire national : 1993 - 2002 Selon le sexe

Etude de la profession

La profession a pu être étudiée sur un échantillon de 323 dossiers , celle qui a été le plus souvent retrouvée est : fellah 20 %, elle sera suivie par commerçant 13 %.

Ces résultats rejoignent les données de la littérature où l’on retrouve une fréquence des lymphomes chez les personnes exposées aux herbicides et aux produits chimiques.

professions
effectifs
pourcentages
fellah
64
20%
commerçant
43
13
corps constitué
40
12
chauffeur
29
9
maçon
29
9
employé
34
10
universitaire
20
6
enseignant
14
4
autres
50
15
total
323
100%

Incidence

Sur les 1596 fiches exploitables, on note un taux d’incidence variable selon les régions, il est de 5.04 pour la région sanitaire centre, 6.25 pour la région sanitaire Ouest, 5.86 pour la région sanitaire Est, 4.23 pour la région sanitaire Sud Ouest, 1.46 pour la région sanitaire Sud Est.

L’incidence moyenne nationale est de 5

Le risque relatif d’avoir un LMNH semble plus faible dans notre population qu’en Europe ou aux Etats-Unis où le risque relatif est de 12 à 15 cas pour 100.000 habitants.

REGIONS
NOMBRE DE CAS
POPULATION
incidence pour 100000 habitants
Centre
588
11668915
5,04
Est
517
8815645
5,86
Ouest
416
6651919
6,25
sud est
36
2461449
1,46
sud ouest
39
920961
4,23
Total
1596
30518889
5,22

Incidences selon les régions des LMNH ganglionnaires de l’adulte

 

Etude anatomopatologique

Dans notre étude l’examen histopathologique a été effectué dans 1603 cas.

Le diagnostic a été posé sur un examen cytologique dans 80 cas . Le diagnostic de lymphome a été porté sans précision du type dans 40 cas .
Les lymphomes ont été classés en :

Lymphomes aggressifs
- Lymphome à grandes cellules GC ou DLCL : diffuse large B cell lymphomasont inclus dans cette catégorie les Immunoblastiques et les Centrblastiques
- Lymphome de burkitt / BL : Burkitt lymphoma
- Lymphome lymphoblastique / LL : Lymphoblastic Lymphoma
- Lymphome anaplasique AP ou ALCL : anaplastic large cell lymphoma

Lymphomes indolents :
- Lymphome lymphocytique LC ou SLL : small lymphocytic leukemia
- Lymphomes centrocitique centroblastique de la classification de Kiel qui correspondraient aux lymphomes follicullaires LF des nouvelles classifications

- Lymphomes centocytiques LC
- Lymphome lympho plasmocytoide LP.

 

les pourcentages des différents types histologiques et leur comparaison aux publications internationales, sont donnés dans le tableau suivant :

FREQUENCE DES DIFFERENTES ENTITES DE LA REAL CLASSIFICATION
EN ALGERIE

FL Folliculaire 15
GC Grandes cellules 37
LC Lymphocytique 12
LL Lymphoblastique 10
LB L de Burkitt 3
ANAPLASIQUE 5
CC Centrocytique 4
Autres 14
total 100

Fréquence relative de la REAL classification dans le monde

LF 22
MALT / MZL 9
Manteau 6
GC 34
LC 6
LB 1
LL 2
LP 7
AUTRES 13

On constate un nombre de lymphomes à grandes cellules (GC ) sensiblement identique aux études internationales, un nombre élevé de lymphomes lymphoblasiques (LL) 10 % et burkitt (LB) 3 % contre respectivement 2 % et
1 % dans l’étude Internationale.

Les lymphomes folliculaires ( LF), représentés probablement par les LMNH centrocitiques centroblastiques sont de 15 % dans notre étude et 22 % dans l’étude internationale.

CONCLUSION

Ce travail coopératif qui a nécessité beaucoup d’efforts par l’ensemble des collègues qui ont participé aux dépouillements des dossiers , doit être le début d’un travail prospectif.

Les journées consacrées aux lymphomes malins non Hodgkiniens lors du premier congrès d’hématologie et de transfusion sanguine ont permis certes de montrer nos défaillances dans le diagnostic et la prise en charge mais surtout de montrer les progrès qui doivent être accomplis en collaboration avec nos collègues histopathologistes afin d’améliorer le diagnostic , d’adopter une classification commune et oeuvrer pour une meilleur prise en charge des LMNH sur le territoire national.

BIBLIOGRAPHIE

Coiffier B .Cavalli F, Hansen HH.
Les lymphomes non hodgkiniens. Textbook of medical oncology, 1997
Anderson JR, Armitage JO, Weisenburger.
Epidemiology of the non- Hodgkin’s lymphomas.

Distributions of the major
Subtypes differ by the geographic locations, Ann Oncology 1998.
Hardy-Bessard AC, Solal-Celigny P.
Lymphome folliculaire. Actualités 1996

Ont participé à l’exploitation des fiches de lymphomes :

D.SAIDI, Y. RAHAL, S.TAIBI, S.ZOUANI, R.MRABET, F.TOUHAMI MEKNOUS, L.ZATLA,W.SFAOUI, D.HENDEL. M.A.BEKADJA, H.TOUHAMI (Oran)
RM HAMLADJI, F.TENSAOUT, N.AIT AMER, N.TRABZI, M.SAIDI,
H. BELAIDI, R. AHMED NACER, N.ABDENNEBI , M.BENAKLI, F. MEHDID, A.TALBI, S.GOUDA, F. BOUKHEMIA, N. BOUDJERRA (CPMC)
M.T. ABAD, M.BRADAI, F. LAMRAOUI, S. CHEBREK, S . OUKID,
S. TAOUSSI, S. AMOURA, H. HAMIDAT (Blida)
S. HAMDI, F.Z TOUIL,F.Z BENKHODJA, H.HAMOUDA, K .DEBBACHE I . BENTAHAR, M. BENABID, .AMOURA, F.Z KHALED, M.DALI, K.BENLATRECHE (Sétif)
MEZGHACHE .N, RACHED.B , GRIFFI.F (Annaba)
Z.OUCHEMANE, Z.HABIBI, N. SIDI MANSOUR . (Constantine)
RAMAOUN.M , BENSADOK. N , LOUANCHI.L , NEKKAL.MS , BERKOUK.Y, BELHANI .M (Béni- Messous )
BEZZOU.H, MESLI..N (Tlemcen)
DJOUADI.K, BELAKEHAL.SE , TAHARBOUCHET.F , ARDJOUN (HCA)
M. ALLOUDA, L. AINAS, O. OUANES, N. DALI , H. AIT-ALI (Tizi-Ouzou)
TALBI. M (Béchar)
EL MESTARI.A, TAYEBI.K , SID ALI .N , MAGHRAOUI .A, BELKHECHI.O,
BOULANOUAR.N, ZOUAOUI. Z (Sidi Bellabes)
BOUGHERIRA, OUARLHENT (Batna)
MAKHLOUF.F, FASILET, FARAH F/Z (épidémiologie de Bab EL Oued)
SLIMI (MSP)









.